Concordia
Une station polaire pas comme les autres...
Généralités
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Généralités
La station Concordia est une des trois stations polaires permanentes situées à l'intérieur du continent Antarctique. Avec une position géographique de 75°06'06''S 123°23'43''E, elle se situe à 1500 km du pôle sud, sur le troisième dôme le plus haut de l'Antarctique à 3233 m d'altitude : le Dôme C. L'air étant moins dense aux pôles à cause de la rotation de la Terre, comparée à nos latitudes tempérées, l'altitude est en fait équivalente à 3700 m avec une pression moyenne annuelle de 645 Hpa. Le coeur de l'Antarctique est l'endroit le plus sec au monde, l'air y est 1000 fois plus sec qu'au bord de nos côtes françaises et les précipitations moyennes annuelles au Dôme C ne sont que de 2 à 10 cm.
La strucure métallique des tours de Concordia
lors de sa construction au début des années 2000
J. Burdin
C'est la seule base de tout le continent à être gérée de manière internationale, par la France (Institut français Paul-Émile Victor) et l'Italie (Programma Nazionale di Ricerche in Antartide). Pour l'instant. Des rumeurs courent et il est plus que probable qu'à l'avenir l'AWI (institut polaire allemand) soit impliqué également dans les affaires de la jeune station.
Sa construction sur place a commencé en 2000. Il a fallu près de 5 années à raison de 2 à 3 mois de travail par an durant le court été polaire pour achever la construction des deux tours, édifices principaux du site. Le premier hivernage a donc eu lieu en 2005 : c'était avant tout une phase de test et la fin de la construction de la station. Antérieurement à la construction de la base, les travailleurs polaires (techniciens et chercheurs) bénéficiaient (et bénéficient toujours d'ailleurs) d'infrastructures appelées "camp d'été" : une succession de tentes de vie (dortoirs commun de 4 ou 6 places, laboratoires, réfectoires) posées à même la neige et des containers pour stocker vivres et matériels.
Le camp d'été aujourd'hui au Dôme C - J. Zaccaria
Comme son nom l'indique, ce camp n'est utilisé que durant l'été austral, de début novembre à début février. Les températures extérieures l'hiver (minimas à -80°C et moyennes hivernales de -60°C) imposent une construction en dur pour pouvoir subvenir aux besoins en énergie d'une vie en autarcie de 9 mois d'isolement.
La détermination du Dôme C comme choix d'implantation de la station est multiple :
- plus de 3000 mètres de glace, ce qui permet aux forages glaciaires de remonter au plus loin dans l'échelle du temps.
- l'altitude, les observations astronomiques y sont d'autant améliorées
- la qualité de l'atmosphère pour ses observations
- le sommet d'un dôme, là où la glace offre le plus de stabilité et travaille le moins
- l'isolement, l'éloignement des autres stations, le site est exempt de toutes perturbations et activités humaines, ce qui favorise les activités de géophysique.
Structure
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Structure
La base est construite sur pilotis pour deux raisons. La première pour éviter la formation des congères lorsque le vent souffle. La deuxième, qui est en réalité la raison principale, est que le sol est constitué uniquement de glace. Il a donc fallu tout d'abord réaliser une "plateforme", une zone ou la neige a été particulièrement tassée afin d'obtenir la densité voulue pour pouvoir supporter le poids de la station. Chacun des pieds de la structure est monté sur verrin hydraulique, ce qui permet de compenser l'enfoncement des tours et les mouvements de la glace.
Mise en place des pieds de la station Concordia
J. Burdin
Chaque tour comporte trois étages relié par un pont au niveau du premier. L'accès à l'entrée principale se trouve au milieu du pont. On y accède par l'intermédiare d'un escalier. A droite, c'est la tour dite "bruyante" qui comporte : le restaurant ; les ateliers ; les activitées de loisirs ; l'accès vers la centrale électrique et le local de traitements des eaux via un deuxième pont. A gauche, la tour "calme" qui comporte : les chambres ; les laboratoires ; et la salle radio/informatique.
L'organisation des tours - IPEV
La surface totale de la station est de 1500 m2.
Tour bruyante (Ã gauche sur le croquis) :
- 1er : Bureau technique ; atelier ; local déchets (compacteur, digesteur, bac à graisse) ; urinoirs, groupe électrogène de secours, plomberie, accès vers la centrale életrique via une passerelle
- 2ème : magasins alimentaires, toilettes femmes, salle de sport, salle vidéo
- 3ème : restaurant, cuisine, salon/bibliothèque
Tour calme (Ã droite) :
- 1er : hôpital, salle mail, cabine téléphonique, incinolets, douches
- 2ème : chambres, douches, toilettes femmes, lingerie, issue de secours (manche)
- 3ème : laboratoires (météorologie, chimie de l'atmosphère, glaciologie, recherche médicale, astronomie, géophysique) ; salle informatique et des télécommunications
Logistique
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Logistique
Celle-ci est gérée pour l'instant par les deux organismes polaires français et italien (IPEV et PNRA). Elle consiste à amener à destination personnel, vivres, matériel technique et scientifique. La logistique n'intervient que pendant l'été austral (de novembre à février) comme dans toutes les autres bases. En effet, la banquise hivernale ne permet pas aux bateaux de rejoindre facilement les bases côtières et la nuit polaire ainsi que le froid intense qui sévit de mars à octobre rendent difficile d'accès les bases du plateau antarctique par voie aérienne. Plusieurs types de transport sont utilisés.
Les avions
Depuis l'Europe, un vol commercial permet en premier lieu de rejoindre la ville de Christchurch en Nouvelle Zélande. De là , un service aérien militaire américain emmène les passagers sur les côtes antarctiques à bord d'un C130 (vol de 8 heures) ou C17 (vol de 4 heures). Deux destinations sont possibles : la base estivale italienne Mario Zucchelli ou la base permanente de Mac Murdo. Dans le cas où un C130 est utilisé (plus petit), un bulletin météo de Mario Zucchelli et Mac Murdo sont envoyés aux pilotes. Si le temps est mauvais à l'une des deux destinations, les pilotes feront demi-tour car la portée de l'avion n'est pas suffisante pour pouvoir effectuer un trajet aller et retour sans escale.
A Mario Zucchelli, les avions atterrissent sur une piste damée sur la banquise, stable dans la baie de Terra Nova. A Mac Murdo l'atterrissage est effectué sur l'ice shelf de Ross : la partie de la calotte antarctique qui s'épenche sur la mer.
L'étape suivante consiste à voler à bord d'un plus petit porteur : des twinotters ou DC3. Ces avions et leurs pilotes viennent tout droit du Canada spécialement pour effectuer cette tâche.
Le vol dure quatre heures environ, à une vitesse de croisère d'à peu près 200km/h pour rejoindre la station Concordia début novembre, mettant fin à l'hivernage de ceux qui sont arrivés l'année précédente.
Durant l'été polaire, plusieurs vols par semaine vont ravitallier la station italo-française, en provenance de Mario-Zucchelli, Mac Murdo, ou encore Dumont d'Urville.
Ceux-ci pourront, en plus du personnel, amener du matériel et des vivres de dernière minute. Ces petits bimoteurs peuvetn transporter de de 600 kg à 2 tonnes de fret suivant les modèles. C'est également le moyen de rappatriement sanitaire en cas de problèmes en été.
Ces vols sont gérés par l'institut polaire italien (PNRA).
Le bateau
Il sert à transporter le gros du matériel. Les cantines des hivernants, certains vivres et matériels sont mis en caisse à Brest où se situe l'IPEV (institut polaire français). Le tout est envoyé par navire commercial à Hobart, au sud de la Tasmanie en Australie. Depuis ce port mythique, départ de nombreuses expéditions polaires, le navire polaire "Astrolabe" prépare son départ. Le fret est complété sur place, par de la nourriture locale par exemple. Puis vient une traversée de 2700km dans les mers les plus mouvementées du globe. Destination : la base française cotière Dumont d'Urville. Le navire effectue ainsi 5 rotation, baptisées R0 à R1, de fin octobre à fin février. R0, la première rotation, est assez particulière puisque le navire, arrêté par les glaces, ne peut atteindre la base scientifique. Le déchargement s'effectue donc à distance via hélicoptère. La débâcle estivale permettra en revanche à l'Astrolabe de rejoindre les côtes antarctiques sans difficultés lors des futures rotations. Arrivé en Terre Adélie, une partie du chargement à destination de la station Dumont d'Urville
est bien sûr stockée sur place, l'autre partie, à destination de Dôme C est transportée via hélicoptère à quelques kilomètres de là , sur une base estivale annexe, en bordure du continent : Prud'homme. Suivant la nature du fret,deux solutions de transport sont alors possibles : les avions comme mentionnés précédemment (une piste amménagée à même la glace se trouve à 10km à l'intérieur "des terres" à partir de Prud'homme) ou...
Le raid
C'est l'unique convoi terrestre qui existe en Antarctique. Pris en charge par l'institut polaire français, il permet de ravitallier de manière conséquente et à moindre coût la sation continentale franco-italienne.
Le raid, en partance de Dumont d'Urville, apporte à Concordia vivre, matériel et carburant nécessaires à travailler et pouvoir vivre durant l'été austral et tout le reste de l'année. Il achemine 150 tonnes de fret en moyenne par trajet (1100km aller et autant au retour). Il effectue trois voyages durant l'été antarctique, chacun durant près d'un mois : une traversée d'une dizaine de jours à raisons d'une centaine de kilomètres par jour pour le voyage aller Dumont d'Urville - Dôme C ; deux jours sur place à Concordia pour le déchargement/chargement ; une dizaine de jours encore pour le retour ; enfin, deux à trois jours de nouveau pour le déchargement/chargement. Sur place à Dôme C, le raid remmène avec lui tous les déchets stockés durant l'année à dôme C. Ceux-ci seront ensuite transportés par voie maritime par l'Astrolabe en Australie.
Ce convoi exceptionnel nécessite une dizaine de mécaniciens, seul métier vraiment utile durant ce parcours, et un médecin, au cas où. En dehors des soins, il prendra en charge la préparation des plats et fera le plein des véhicules pendant que les collègues réparent les pépins, toujours nombreux en raison des conditions météo, d'une piste chaotique et des fortes contraintes imposées aux engins.
En premier lieu, un chasse neige dame une piste, en suivant les mêmes points GPS d'une année sur l'autre. La piste est choisie de manière à offrir aux engins une montée qui soit la plus régulière possible, afin d'économiser du carburant. Certaines cuves de carburant (de 12 à 36 tonnes chacune) sont abandonnées sur le trajet aller pour des raisons d'économies. Elles seront ensuite récupérées et utilisées sur le chemin du retour pour alimenter les engins en gasoil. Des tracteurs spécialement dédiés à ce genre de travaux tirent à la queue leu leu des containers montés sur ski. Parmi eux, la "caravane vie" du raid dans lequel la petite équipe dort et se restaure. La piste est bordée d'un côté par un "cordon", petit monticule de neige que dessine le chasse neige de tête. Cela permet aux engins de retrouver plus facilement leur chemin d'une année sur l'autre et de suivre la route.
Ce moyen de transport est unique en Antarctique. Il inspire d'ailleurs les américains pour relier leur base côtière Mac Murdo à Amundsen-Scott au pôle sud, mais cela leur est pour l'instant difficilement réalisable en raison du terrain fort accidenté entre ces deux bases.
Vie quotidienne
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Vie quotidienne
D'où vient l'eau, l'éléctricité ? Que mange-t-on ? Que fait-on durant ses loisirs ? Comment s'organise la vie au jour le jour ? Voici les quelques questions auxquelles nous allons répondre dans ce paragraphe.
D'où vient l'eau ? denrée rare dans ce monde de glace...
Alors que les stations côtières déssalent l'eau de mer, ici l'eau provient de la neige située aux alentours de la station et que l'on fait fondre dans un bac adapté : le fondoir. D'une capacité de neuf mètres cubes, il est rempli régulièrement à l'aide d'une pelleteuse selon les besoins de la station. L'eau de fonte de neige antarctique alimente en eau courante toutes les infrastructures de la base qui en ont besoin (eau potable, machines à laver le linge et la vaisselle, douches, urinoirs, etc...).
Un système de traitements des eaux usées, GWTU (Grey Water Traitement Unit), unique en son genre et pensé par l'ESA (l'Agence Spatiale Européenne) recycle 80% des eaux usées par ultrafiltration, nanofiltration et osmose inverse. Une fois traitées, elles sont ensuite réinjectées dans le circuit d'eau domestique. Le petit nom d'usage sur place pour ce système est "la blonde", car les hommes passent beaucoup de temps à travailler dessus...
L'eau à la sortie est potable et n'a pas de goût particulier. Pour des raisons de sécurité (en cas de mauvais fonctionnement de la machine par exemple), l'eau que nous buvons est directement l'eau de neige fondue pour éviter tout type de contamination. Pour des raisons techniques, il est interdit d'uriner dans les douches! Au risque d'endommager le système de traitement, et de cuire les pâtes avec notre pipi...
Le seul hic dans tout ceci : les urines, les eaux très sales (de nettoyage des sols par exemple), et les boues résiduelles du traitement des eaux (les 20% restants) sont laissés sur place, faute de solutions techniques pour ramener des déchets liquides de ce type à la civilisation (problèmes de stockages, de douanes, etc...). Une possible solution consisterait à obtenir des boues solides qui puissent être stockées et ramenées facilement. Ce genre d'équipement est unique au sein des bases continentales, les autres stations situées sur le plateau antarctique laissant tous ces types de déchets sur place. Toujours pour des raisons de compatibilité avec ce système de traitement des eaux, les produits de toilette personnels sont interdits. Une seule marque de savon et de shampooing est autorisée et est fournie par les instituts polaires. Le GWTU est un prototype dont l'une des futures générations équipera les prochains vols habités vers Mars.
Et les toilettes ?
Comme pour les déchets domestiques, ici aussi le tri sélectif est de vigueur ! Les urines d'un côté, les sels de l'autre !
Pour ce, la station est doté d'une part d'urinoirs, placés au beau milieu de la passerelle qui mène du bâtiment bruyant à la salle des machines de la centrale électrique. Et d'incinolets. Immaginez une cuvette métallique sans eau au fond. Placez-y une cornet en papier, faîtes-y vos besoins. Enfin, actionnez la pédale : le tout tombe au fond d'un récipient... N'oubliez pas d'appuyer sur le bouton : la température du récipient montera à 500°C. Videz en moyenne les cendres toutes les 12 utilisations...
Ici aussi il y a l'éléctricité
Des panneaux solaires ? Il n'y aura donc pas d'énergie durant la nuit polaire, qui dure plusieurs mois par an... L'éolien ? L'une des raisons du choix du site est justement la faible perturbation atmosphérique... Le nucléaire ? Interdit par le traité sur l'Antarctique. Reste donc le gasoil.
La centrale électrique - J. Zaccaria
Celui-ci est l'unique source d'énergie au coeur du continent Antarctique. La centrale électrique de Concordia possède trois groupes électrogènes et un de secours. Au niveau de la mer, leur puissance est de 120 KW. Mais avec l'altitude et malgrè les modifications qui y ont été apportées, leur rendement est diminué pour n'atteindre que 100 KW de puissance. Un seul des trois groupes fonctionne et suffit à la consommation de la base. Le deuxième groupe est mis en route lorsque le premier est en maintenance, enfin, le troisième sert au cas où l'un des deux autres est en panne. Les trois groupes sont utilisés à tour de rôle pour un usage et une usure équitable. La base consomme en moyenne 600 litres de carburant par jour pour une demande constante de 80KW en moyenne. Le carburant est stockés dans 17 cuves de 18 000 litres chacune. C'est un mélange de gasoil et de kérosène. Ceci lui permet de mieux supporter le gel. Ainsi trois cuves sont constamment chauffées à -30°C : l'une alimente le groupe en fonction, la seconde sera utilisée lorsque la première sera vide, la troisième enfin est chauffée en cas d'avaries des précédentes. L'énergie électrique produite par la centrale alimente en électricité tout le réseau de la base (lumière, informatique, etc...), mais aussi les résistances du fondoir, des cuves à eau et des cuves à carburant ! Le chauffage des deux tours est quant à lui exclusivement fournit par la cogénération des groupes électrogènes (on récupère la chaleur dégagée par les groupes pour alimenter le circuit de chauffage).
Durant l'été, la centrale électrique du camp d'été est également en fonction. Elle se compose de deux groupes éléctrogènes seulement et un de secours.
Pour plus d'info sur la vie sur place, consultez le blog.
La station Concordia aujourd'hui - J. Zaccaria